15/02/2008
Nouveaux trésors
de St-Paul-Trois-Châteaux,
on a ramené des trésors.
Hydromène, d'abord.
Hydromène, La chambre d’un garçon
Iwan
Traduit du coréen par Mikyung Choi et Jean-Noël Juttet
Corée, Quiquandquoi – 28 €
Depuis quelques mois, les artistes coréens déboulent sur les tables des librairies jeunesses. A la Fête du Livre jeunesse de St-Paul-Trois-Châteaux, sur le stand des éditions Quiquandquoi, on a découvert un vrai chef-d’œuvre. Le mot est pesé. Si le spectre de la surproduction (le vilain mot) hante les librairies jeunesse, restent les chefs-d’œuvre. Hydromène en est un.
« Le livre-delta qui déploie tout le fleuve (…), un livre-monde, un livre-odyssée ». 133 pages d’un voyage inoubliable dans la chambre d’un garçon. La première page, immense, c’est le premier pas du voyage. Hydromène se tient debout face à nous, un enfant dans la main, dans l’autre un arrosoir. Et ces mots : « Complètement desséché, l’enfant s’est évanoui. » L’enfant en question n’a rien d’un enfant, il a des pattes, des oreilles. Hydromène a un corps de poisson. A la place des côtes on lui devine des nageoires.
Impossible de raconter ce livre. Les premières pages suffisent à embarquer. Chacun lit ce qu’il veut – cette phrase a l’air évidente, elle ne l’est pas. Rares sont les livres qui permettent des lectures si distinctes. La chambre d’Hydromène est envahie par les eaux. J’ai vu, dès le début, une chambre d’hôpital, pour le dénuement, l’étouffement aussi. Et puis les visions changent. Les pages se tournent et je vois, clairement, que la chambre d’Hydromène, c’est le ventre de la mère.
J’arrête là ma lecture. Trois pages n’y suffiraient pas. Pour qui veut faire le voyage, ce livre est merveilleux, dans tous les sens. Envoûtant et étrange. Hydromène a été publié par Artbooks en Corée, et découvert par Quiquandquoi aux foires de Francfort et de Bologne. Iwan est une jeune auteure illustratrice née en 1973. Son pseudonyme, imaginé durant ses études à la Korea National University of Arts, vient de "I want". Selon Jean-Marie Antenen, les sujets abordés par l’édition jeunesse coréenne sont universels, mais simplement approchés sous un angle différent, propre aux origines culturelles et historiques de leurs auteurs. « Et c’est souvent cette manière différente de la nôtre d’aborder des thèmes universels qui donne à cette production sa force aux yeux du public européen ». Selon l’éditeur encore, « l’histoire de l’art imprègne cette production: la manière d’aborder l’espace, la "perspective", le traitement du paysage et de la couleur, ainsi que les techniques utilisées sont très différentes chez les illustrateurs coréens et chez leurs collègues européens. Pour les lecteurs français, suisses ou belges, le graphisme des albums coréens est un voyage à lui tout seul, la découverte d’un univers visuel. »
Si on voulait rattacher Hydromène à nos lectures connues, il me semble que c’est un mélange de l’univers pleinement onirique des films de Miyazaki, avec le graphisme parfois diaphane d’Anne Herbauts ou celui de Kitty Crowther. C’est sur les mots d’Iwan que l’album se referme : « J’ai l’impression que le monde où je vis devient de plus en plus compact, sans porosité, sec, un monde où il devient difficile de respirer. Pourtant je n’attends pas qu’Hydromène vienne l’arroser ».
Mais si. Des albums comme celui-ci permettent l’échappée nécessaire, ouvrent une porte pour le rêve. Qu’importe qu’on la referme.
Et puis on a rencontré Manon.
Manon a créé La maison est en carton, une maison d'édition tournée vers l'image. Elle ouvre la porte d'un nouvel espace de création dans l'univers de l'édition jeunesse, différent de celui du livre.
A L'Eau Vive, vous pouvez désormais acheter les images inédites que les illustrateurs ont créé (spécialement, donc) pour La Maison est en carton.
Beatrice Alemagna
Kitty Crowther (et je crois qu'une vitrine se prépare à L'Eau Vive autour de ses livres)
Martin Jarrie
Gianpaolo Pagni (arghhh, mais quand est-ce qu'il publie un nouveau livre ?)
et François Roca.
16:55 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.