30/06/2010
On sort nos griffes
Je viens de recevoir les impressions de lecture de deux bibliothécaires adorées, Régine et Sophie. J'avais juste commencé, une page ou deux, le livre d'Honoré mais je vais peut-être le reprendre. Elles me donnent envie, en tout cas.
Parfois, nous aussi, on sort nos griffes…
Régine : Grrr !…J’aime l’écriture de Christophe Honoré depuis « Tout contre Léo », et ses pages les plus noires pour adultes m’interpellent beaucoup sur la nature humaine.
Là, dans « j’élève ma poupée », j’ai bien ri. J’ai ri pour la parodie du « fameux » livre de L. Pernoud, j’ai ri chaque fois qu’il lance ses griffes en direction des « grands »…, des adultes quoi !
Mais les questions tournent dans ma tête. OUI, je défends le droit de prendre les enfants pour des personnes entières, OUI, je défends le fait de ne pas les prendre pour des benêts, OUI, je suis d’accord avec Claude Ponti pour leur dire que la vie n’est pas toujours (ou souvent pour les pessimistes) « cool »….
Mais, comment je fais, moi, la modeste passeuse de livres, pour, à la fois, leur laisser le droit à l’enfance pleine de rêves et d’aventures, l’enfance belle, et leur « passer » « j’élève ma poupée » ?? Il me faut choisir, je me sens tendance schizophrène…
Et puis, aussi, j’ai beaucoup de regrets que ce texte soit édité en jeunesse, il serait tellement, tellement bien entre les mains des adultes… D’ailleurs, je vais en choisir des extraits pour les lire à voix haute à des adultes ! Oui, c’est ça,…je vais le faire « passer » aux égratignés !
Sophie : Mais qu'est-ce qui leur arrive à tous ces auteurs ? Ils veulent flinguer les enfants ou bien ? Christophe Honoré, je t'en supplie, retourne faire des films et cesse d'écrire pour les enfants ! ! Très chouette livre que celui-ci, mais pour les adultes, bon dieu de bip ! Et Télérama qui dit que c'est génial ! OK, mais pour qui ??? Ou alors je suis complètement à côté de la plaque et il faut que je me recycle !
La deuxième partie, c'est vrai, est nettement plus enfantesque (le chapitre des recettes) mais il faut aller jusque là !!
Ce que je dis là n'enlève rien au fait que moi, vieux pruneau,j'ai beaucoup ri et aussi été très touchée par certains passages ("j'ai soudain l'envie joyeuse de courir avec elle dehors, parce que c'est octobre, que les feuilles ont commencé à tomber, que la pluie s'est mise à tomber aussi et qu'elle va nous dévisager quand nous tendrons la bouche vers les nuages...") C'est pas dommage si des adultes passent à côté de ce texte ?
Sophie : Zarra de Carole Fives Neuf (ils peuvent pas créer une collection Douze?)
J'ai décidé que j'en avais marre de tous ces romans jeunesse à base de vie réelle pleine d'em.... auxquels sont confrontés souvent, hélas, les enfants. Ont-ils envie de retrouver dans un bouquin les tracas quotidiens qu'ils affrontent chez eux ? Est-ce qu'un enfant a forcément envie de retrouver sa vie dans un livre ? N'ont-ils pas plutôt besoin d'évasion, de rêve ?
je crois que trop souvent, dans nos choix de livres, on ne se met pas à la place des enfants. D'abord, je trouve que beaucoup de romans jeunesse correspondent aux adultes, à l'enfant qu'ils ont été. Ces romans nous plaisent parce qu'ils nous parlent de nos émotions d'enfant mais avec le recul que nous pouvons avoir... Mais les vrais enfants ?
J'ai parlé de tout ça avec Mathilde (ma fille de 21 ans). Elle m'a dit que quand elle était petite, elle détestait les livres qui parlaient de la vie réelle ; elle adorait les livres où les enfants étaient orphelins et à qui il arrivait des aventures rocambolesques. Qu'elle bâtissait des scenarii pour ses jeux à partir des romans qu'elle lisait..
Je crois qu'il faut essayer de penser enfant quand on choisit les livres qu'on a envie de leur proposer à la bibliothèque. Pourquoi est-ce que les romans sortent si peu? Parce qu'on se trompe. Il faut de la qualité, mais de l'imagination, du rêve. Il faut que les enfants connaissent la réalité, mais pas que...
Vladimir Sergueëvitch de Matthieu Sylvander en neuf, c'est vraiment bien!! et docteur Fred et Coco Dubuffet de Catharina Valckx aussi. Voilà des romans qui répondent à mes nouveaux critères.
Mais Zarra c'est très bien écrit et ça dépeint bien ce que ressent une petite fille dont la mère est maniaco-dépressive.
Régine : En ces temps de coupe du monde, en ces moments scandaleux du séjour de joueurs dans des hôtels 5 étoiles et du « déplacement » de milliers de personnes pour construire un stade, ça n’a pu me faire que du bien de lire le chouette « Frissons de foot à Bangui » de Yves Pinguilly. C’est la belle histoire de Zangba, gamin des rues à Oubangui. Il fera LA rencontre qui le mènera dans une école de foot où il aura toutes ses chances… Belle histoire, oui, et qui ne tait pas pour autant la noirceur du monde aux enfants qui la liront...
Un peu plus tard, ça m’a fait plaisir de me distraire avec « Aggie change de vie », histoire rocambolesque d’une imposture ! on s’attache très vite à tous les personnages….Malika Ferdjouk a toujours le don de nous embarquer dans d’autres temps et lieux vite fait bien fait…ça fait du bien !…
12:20 Publié dans lectures | Lien permanent | Commentaires (0)
26/06/2010
Bleu
Yvette a fait une vitrine magnifique, toute bleue et blanche et remplie de bateaux, de coquillages (vrais) et de vagues.
Merci Cécile :-)
14:53 Publié dans Vitrines | Lien permanent | Commentaires (4)
24/06/2010
(no need to argue)
Ce matin, un papa (je présume) me demande un roman sur la musique pour un ado de quatorze ans. Il a vu les deux premiers titres de la nouvelle collection Backstage, chez Nathan, sur la table, mais ça ne lui dit rien. Je lui montre L'échelle de Glasgow, de Marcus Malte, je lui dit que c'est un roman magnifique, très bien écrit, mais non. Non. Non parce que peut-être que ce qui l'embête c'est que c'est un père qui parle à son fils de quand lui était ado et qu'il jouait de la guitare. Il parle à son fils dans le coma. C'est un roman magnifique. Je ne peux pas lui trouver mieux.
Je lui montre quand même J'ai quinze ans et je ne l'ai jamais fait, qui parle beaucoup de musique, un chapitre sur deux est écrit par un narrateur, masculin, qui joue dans un groupe et qui a un concert important dans quelques jours. Non. Grrrr. J'aime pas quand ça marche pas :-) Enfin non, j'aime pas quand on refuse d'emblée un roman magnifique.
Une heure plus tard, peut-être, y a deux ados qui entrent dans la librairie. Un garçon et une fille. Le garçon tend à la fille J'ai quinze ans et je ne l'ai jamais fait en disant "Tiens, c'est pour toi". Elle fait la grimace et dit "eh, j'ai seize ans". je ne lui dit pas que c'est pire, comme réponse :-) et je replonge le nez dans mes feuilles de réassort...
14:37 | Lien permanent | Commentaires (2)
22/06/2010
In & Off
Voici quelques-unes des pièces adaptées de livres qui seront jouées cet été dans le festival Off d'Avignon.
Que du lourd :-)
(c'est sur Skyrock qu'ils disent ça, j'adore cette expression)
(oui parfois j'écoute Skyrock)
14:26 Publié dans lectures | Lien permanent | Commentaires (0)
19/06/2010
pre-rentrée
En août paraîtront trois petits romans dans une nouvelle collection de textes courts destinés aux ados, chez Sarbacane. J'ai eu la chance d'en lire deux. Le cachalot, d'Alexis Broxas (assez... bluffant, je crois. j'aurais plaisir à le conseiller) et Johnny, de Martine Pouchain (assez... terrifiant, mais en regard de l'autre, presque trop lisse).
Ce midi, j'ai emmené à côté les épreuves du dernier texte de Guillaume Guéraud (j'aime bien cette interview de lui, là), Sans la télé, à paraître en septembre aux éditions du Rouergue.
Quand il sortira, je l'offrirai à ma maman. Parce que je trouve que c'est un très bel hommage au cadeau que lui a fait sa mère à lui, en l'emmenant au cinéma très tôt, puisqu'ils n'avaient pas la télé. Il voit des films comme Le voleur de bicyclette ou La strada. Il pleure.
Dans la bibliothèque, chez eux, il y a une photo en noir et blanc, encadrée. Guillaume Guéraud suppose que c'est son père. C'est Montgomery Clift (chez nous il y avait une photo de Marlon Brando). Et il y a une phrase que j'aime bien, c'est à la sortie des Désaxés. Il dit "Même les nuages grincent comme des muselières".
Ce soir, j'emmène les épreuves de Souviens-toi de la lune, de Stéphane Servant (qui a notamment écrit le très beau Guadalquivir, chez Gallimard). C'est aussi un roman qui doit paraître en septembre au Rouergue. Vive les épreuves.
(petit ajout en date du 24 juin : Adèle Leproux des éditions du Rouergue m'a gentiment envoyé les vraies couvertures des deux romans. c'est sûr, c'est mieux que mes photos floues...)
et puis elles sont très très belles, ces couv :-)
15:01 Publié dans lectures | Lien permanent | Commentaires (3)
09/06/2010
Exclu
Waouh. C'est mon mot. Mon mot de quand on me fait des cadeaux.
Et là, c'est un très beau cadeau. J'en donne un bout. Un p'tit bout.
On avait découvert Thomas Gornet avec son premier livre, Qui suis-je ?, paru en médium à L'école des loisirs en 2006. Et puis on avait été le voir jouer sur scène, L'oeil de l'ornithorynque, en juillet 2007, au festival Off d'Avignon. Il avait deux tracts, comme des polaroïds, lui enfant. Le plus beau, c'est pas celui-là, c'est l'autre :-) Il est même posé dans un vase sans fleurs, chez moi.
Et puis en août 2008 est paru son deuxième livre, Je n'ai plus dix ans, et c'était encore plus beau.
Le cadeau qui fait dire waouh, c'est son texte, reçu il y a quelques jours dans ma boite. L'amour me fuit. Un neuf, à L'école des loisirs encore, qui paraîtra à l'automne. Et ça, c'est la première page.
"Il paraît que la sixième fait grandir. Il paraît.
Je le croyais, avant aujourd’hui, avant la rentrée.
Je m’imaginais je sais pas quoi, que mes pieds allaient pousser d’un coup, que mon
nez allait devenir comme celui de mon grand frère, avec des petits boutons dessus, que j’allais
m’intéresser à une émission politique ou lire un journal en noir et blanc et même pourquoi pas
écouter des groupes de rock qui n’existent plus.
Eh bien non.
Je peux le certifier : aujourd’hui, 4 septembre, jour de mon entrée en sixième, rien n’a
changé.
J’ai toujours la même tête, un peu carrée avec l’oreille droite légèrement décollée, la
même mèche de cheveux blancs qui rebique dans mon cou, comme un petit drapeau blanc au
milieu d’une forêt de lianes noires et bouclées.
J’habite toujours tout seul avec mon très grand frère Kaï qui s’occupe de moi depuis
que maman a disparu.
Et, surtout, j’ai toujours ce petit truc à l’intérieur de moi. Un petit truc qui me
provoque du vide aspirant ou alors un plein très angoissant. Une sorte de petit animal qui me
grignote le coeur, qui se ballade dans mes intestins depuis six mois. Depuis le 22 mars, plus
exactement. Quelque chose qui fait qu’il paraît que j’ai « une tête de déterré », d’après Kaï. Je
ne sais pas ce que c’est, un déterré. Mais je sais quelle tête j’ai.
La tête du type qui a été amoureux et qui ne le sera plus jamais. Jamais.
Non, ce n’est pas la sixième qui fait grandir. C’est le chagrin."
Ah. Encore un waouh. Thomas Gornet revient au festival d'Avignon cet été. Vous savez pour jouer quoi ? Tout contre Léo, de Christophe Honoré. Waouh..
11:09 Publié dans lectures | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : thomas gornet, l'amour me fuit, tout contre léo, qui suis-je ?, je n'ai plus dix ans
08/06/2010
"Nous gâchons les enfants"
Ce matin, Régine et Sophie de la bibliothèque d'Abracadalire viennent nous ramener des livres empruntés (et nous dire pourquoi elles nous les ramènent - et pourquoi les autres, elles les ont gardés...) et vite vite avant qu'elles n'arrivent, elles ont envoyé un petit texte. Que voilà. Dedans, une phrase qui nous interroge un peu ("nous, les adultes, gâchons les enfants...") mais il paraît que je dois lire "Une graine en cadeau",pour comprendre. Donc je vais lire "Une graine en cadeau".
Bonne pioche dans les derniers romans pris sur les piles de la librairie…
Travailler pour et avec des enfants en collectivité, ça abîme le regard qui devrait rester émerveillé sur le temps de l’enfance. Nous , les adultes, gâchons les enfants….Puisse se trouver un grand-père comme celui d’Igor dans « Une graine en cadeau » sur le chemin de beaucoup d’enfants que je côtoie…
J’ai beaucoup apprécié le ton donné à la collection « Soon » en Mini Syros, enfin de la bonne science fiction pour les premiers appétits en lecture !…avec une mention toute perso à Carina Rozenfeld pour « A la poursuite des humutes » et à Claire Gratias pour « Opération Maurice ». Dans le 1er, nous sommes dans notre civilisation où les humains sont en train de muter et où la moitié de la population « apparemment » normale fait la guerre à ces mutants…dans le second, on voyage dans le temps. Dans les six titres que j’ai lus, les histoires ont des motivations toutes différentes, ça permet d’avoir un joli éventail pour découvrir la SF, ça a du punch et ce n’est ni à la guimauve, ni kitsch ! Cette SF là prend les jeunes lecteurs au sérieux et j’aime ça !
Je suis sûre qu’on pourrait animer des bons petits goûters « philo-éthiques » avec cette collection…
C’est pas la peine que je revienne sur « Vérité, vérité chérie » puisqu’il a eu le prix sorcières des premières lectures, j’suis fan, y compris des dessins d’Audrey Poussier.
Encore un que j’ai « croqué » vite fait : « La reine des chats » de Elise Fontenaille. Mina a 3 chats et un petit frère qu’elle trouve déjà assez gênant jusqu’au jour où il fait une crise d’asthme consécutive à la présence des chats…là, elle le trouve carrément infréquentable…. Maladresse des parents, belle rencontre, beau sauvetage d’une fugueuse….Illustrations noir et blanc assez accroches….et…beau métier abordé dans ce roman décidément très sympa.
ça, c'était pour les romans lus par Régine ; quant à moi, j'ai lu et bien aimé, après un commencement difficile, »les Willoughby » de Loïs Lowry aussi. Bon,c'est vrai qu'au début j'ai eu du mal avec ce style un peu spécial, genre vieillot (l'auteur n'arrête pas de faire allusion à des romans jeunesse classiques) et d'ailleurs le livre se revendique d'une histoire vieux jeu. Mais on s'habitue vite et on s'attache aux personnages et à l'histoire,pleine de péripéties invraisemblables mais qui correspondent bien à l'idée qu'on se fait d'un livre vieux-jeu,et au final,ça donne un super roman que j'ai dévoré d'une traite et que j'ai quitté à regret.
Mais je crois que mon coup de cœur va aller à « L'appel de l'oiseau de nuit » de Gilles Barraqué. Ah,je n'avais vraiment pas envie de le lire celui-là (d'ailleurs je l'avais gardé pour la fin,dans ma pile de livres), parce que moi, les histoires d'animaux, de nature et puis un peu genre conte, comme ça, c'est pas du tout, mais pas du tout ma tasse de thé ! Ben,j'avais tort ! Je le clame ici haut et fort : ce livre est un petit bijou (hibou,caillou)
Une belle histoire de merveilleux. Une aventure « picaresque », du suspense, de l'amitié, de la poésie...Ouais, un petit bijou. Il eut été vraiment dommage de passer à côté. Il serait vraiment dommage de passer à côté.
11:42 Publié dans les lectures d'Abracadalire | Lien permanent | Commentaires (1)